Lectures pour maitres et maitresses en vacances

Cher Père-Noël, j'ai été sage et j'ai bien travaillé. Au pied du sapin, je serais content.e de voir un joli cadeau avec un ruban coloré. Si c'est un livre à l'intérieur, ce ne serait pas une surprise, mais sois sûr que cela me ferait plaisir.
Mélanie, Charlotte, Sébastien et Mathieu, de l'équipe d'Edumoov, ont rassemblé ici quelques suggestions de lectures plaisir pour vos vacances bien méritées :)

L'Odyssée d'Hakim (choix de Sébastien)

J'ai lu l'an dernier les deux premiers tomes de l'Odyssée d'Hakim, le troisième devait paraitre peu après. J'ai oublié et puis je viens de le voir dans la vitrine d'un libraire nantais . L'occasion de reprendre la série et de replonger dans l'histoire d'Hakim, un jardinier syrien que la guerre force à l'exil. De pays en pays, cet homme se bat pour trouver un chemin vers un endroit où vivre en paix. Les tomes se nomment "De la Syrie à la Turquie", "De la Turquie à la Grèce" et "De la Macédoine à la France". Fabien Toulmé est un auteur BD d'une grande sensibilité - je vous recommande d'ailleurs la lecture de Ce n'est pas toi que j'attendais, le récit de l'accueil d'un enfant trisomique par une famille. Derrière la grande simplicité du dessin et des faits se cache une profondeur et un traitement des faits sans pathos. Évidemment l'ambiance "fêtes de Noël" n'est pas au rendez-vous, mais je vous garantis que c'est un voyage qui en vaut la peine, histoire de mieux comprendre le calvaire des migrants.

La Bête (choix de Mathieu)

Depuis plusieurs années, les éditeurs historiques (Dargaud, Casterman et ici Dupuis) laissent carte blanche à un certain nombre d’auteurs pour dépoussiérer et apporter leur vision à des héros vieux de plusieurs dizaines d’années, et ce pour le meilleur et pour le pire. Ici c’est à Zidrou et Franck Pé que revient la lourde charge de trouver une nouvelle jeunesse aux récits entourant une des plus emblématiques créatures de la BD franco-belge : Le Marsupilami.
Ancrant le récit dans l’après-guerre belge, la bestiole extraordinaire est récupérée par hasard par un gamin vivant avec sa mère dans la banlieue bruxelloise. Arborant un style sombre, dans une Belgique poissarde, la BD est drôle, triste et sombre, le tout dans des proportions que le lecteur déterminera. Une franche réussite.

L'Ickabog (choix de Charlotte)

Youpi le nouveau roman de J.K. Rowling est sorti !
En tant que fan inconditionnelle de Harry Potter, je me suis évidemment jetée dessus dès se sortie, le 3 décembre, curieuse de le découvrir. Et je dois dire que j'ai plutôt bien aimé.
Dans le charmant royaume de Cornucopia, la légende de l'Ickabog se transmet de génération en génération. Mais lorsque le mythe prend vie d'une façon inattendue, c'est tout le royaume qui est menacé. Il s'agit ici à la fois d'un conte pour enfants mais aussi d'une fable politique, dans laquelle on peut y voir la critique du fascisme, du capitalisme, de la propagande.
Comme à son habitude, J.K. Rowling nous régale avec ses jeux de mots et les noms très bien choisis de ses personnages (Lord Crachinay et Lord Flapoon portent très bien les leurs), des villes mais aussi des mets (ici les pâtisseries portent les doux noms de Songes-de-Donzelles, Espoirs-du-Paradis, Délices-des-Ducs ou encore Nacelles-de-Fées).
Bref, voilà un bon roman de littérature jeunesse à mettre sous le sapin.

Nouvelles de Philippe K. Dick (choix de Sébastien)

Gallimard ressort une intégrale des nouvelles de Philippe K. Dick. C'est l'occasion de replonger dans l'univers fascinant de ce fameux auteur de SF. Pour ceux qui ne connaitraient que quelques films, comme Minority Report ou Blade Runner, inspirés de ses œuvres, sachez que Philippe K. Dick a écrit de nombreuses nouvelles (en plus de ses romans - Ubik par exemple) et fouillé des sujets variés, qui résonnent aujourd'hui plus que jamais avec nos vies tourmentées. Avec un intuition et une acuité étonnante, il explore les thèmes du futur, de la manipulation, du capitalisme et de la vérité notamment.

Radium Girls (choix de Mélanie)

Je ne suis habituellement pas une grande amatrice de BD, je préfère les gros pavés écrits tout petits. Mais j'ai été séduite par Radium Girls, qui s'inspire de l'histoire vraie d'employées de l'USRC (US Radium Corporation), dont le travail était de peindre des cadrans de montres avec de la peinture phosphorescente. Leurs supérieurs, pourtant au courant des dangers de cette pratique, les incitaient à lécher leur pinceau pour l'affiner avant de le tremper dans la peinture : elles ingéraient donc régulièrement des quantités importantes de radium.

Ce n'est pas très magie de Noël tout ça (en même temps, on est en 2020, on peut se permettre), mais on ne ressort pas complètement abattu de la lecture. Déjà parce que ces femmes sont pétillantes et courageuses : on partage leur quotidien pendant l'époque de la Prohibition, puis leur combat lorsqu'elles décident d'assigner le géant USRC en justice, malgré la maladie et le peu de considération qu'on leur apporte. La BD met en lumière un pan de l'histoire, qui a permis de faire évoluer les droits des travailleurs en matière de normes de sécurité.
Mais surtout j'adore les illustrations de Cy, dans les tons pastels vert/violet, qui peuvent être tour à tour apaisantes ou violentes, selon la manière dont elle superpose les couches. Chaque femme a une page dédiée, symbolisant la façon dont elle a été marquée par la maladie (ou la mort), comme s'il s'agissait d'une "martyr" de son époque.

Une mention particulière pour la couverture qui est elle-aussi phosphorescente (mais sans risque), effet garanti dans le noir !

Il faut flinguer Ramirez (choix de Mathieu)

Ramirez est le meilleur réparateur d’aspirateurs que la Terre ait jamais porté. Ramirez est un collègue exemplaire, un homme sans histoire. Pourtant quand deux porte-flingues d’un cartel du sud des Etats-Unis le voient en arrivant au SAV de l’entreprise où il travaille, ils se figent, s’en vont sans demander leur reste et contactent directement leur boss qui va envoyer une équipe de tueurs aux trousses de notre spécialiste du nettoyage.
Ceci est le début de l’histoire du premier tome de la série commencée il y a maintenant 2 ans et demi. Le premier tome a été un immense succès public et critique, et Nicolas Pétrimaux était attendu au tournant. Le résultat est à la hauteur et les amoureux des films de genre, de Thelma et Louise et plus généralement des beaux objets (puisque le 2e tome garde ce côté « concept » maitrisé d’un bout à l’autre par son auteur) seront contents de savoir que l’orientation road movie sous amphétamines entrevue lors du premier tome se poursuit dans le second.

La Belle Sauvage et La Communauté des Esprits (choix de Charlotte)

L'an dernier, j'ai relu avec un immense plaisir la fabuleuse trilogie de Phillip Pullman, La Croisée des Mondes. A ce sujet, je vous conseille d'ailleurs l'excellente série The Dark Material (sur OCS) que je trouve très fidèle aux romans.
Près de 20 ans après, Phillip Pullman enrichit cette trilogie avec deux nouveaux opus : La Belle Sauvage et La Communauté des Esprits.

L'histoire de La Belle Sauvage se situe avant La trilogie de La Croisée des mondes. Lyra est un nourrisson et elle vit malgré elle des évènements extraordinaires au cours d'une crue historique de la Tamise. On fait la connaissance de Malcom et Alice, deux adolescents prêts à tout pour la protéger des hommes et des éléments naturels et surnaturels qui la menacent.

Dans la Communauté des Esprits, nous retrouvons Lyra, adulte cette fois-ci. Lyra et son daemon Pantalaimon, âgés de 20 ans, sont profondément marqués par les évènements ayant eu lieu quelques années plus tôt, dans Le miroir d'Ambre (tome 3 de la trilogie originelle). Alors que le Magistérium est plus puissant que jamais et que des évènements étranges se déroulent en Asie Centrale, Lyra, Malcolm et Alice se lancent dans un périple dangereux. J'attends avec impatience la suite !

Peau d'homme (choix de Charlotte et Mathieu)

L’histoire de Bianca, demoiselle de bonne famille, se déroule durant la Renaissance italienne. Ses parents, dans une logique patrimoniale bien compréhensible lui trouvent un bon parti, mais Bianca n’est que peu enthousiaste à l’idée de passer les 40 prochaines années aux côtés d’un homme sans avoir eu un droit de regard dessus. C'est à ce moment que lui est révélé un secret gardé par les femmes de la famille depuis des générations : une peau d’homme à enfiler comme un costume pour vivre une vie de garçon. Elle lui permettra de rencontrer son fiancé dans un cadre différent, celui des hommes entre eux.

Les femmes de notre famille, nous avons un secret, nous avons en notre possession une peau d'homme. Nous l'appelons Lorenzo. Une fois la peau revêtue, nul ne peut se douter que tu n'es pas un garçon. Ainsi tu pourras voyager incognito dans le monde des hommes.

Le récit prend alors une direction passionnante, questionnant le genre et les orientations des différents personnages, insistant sur le poids de la domination masculine sur la sexualité des femmes et leur plaisir, le tout en mélangeant joyeusement et avec humour les questions religieuses, morales et politiques…
Si vous avez des enfants, évitez de laisser trainer cette BD sur la table du salon, le sujet et certaines images sont un peu osés ;)

Le crépuscule et l'aube (choix de Mélanie)

Voici donc venir le gros pavé écrit petit. C'est un peu l'habitude de Ken Follett, le spécialiste des sagas sur fond historique ! L'auteur nous emmène cette fois-ci autour de "l'an mil", entre Cherbourg et le sud-ouest de l'Angleterre, au temps des invasions galloises et vikings. Cependant, ne vous laissez pas avoir par la couverture et la promotion autour du livre : ces derniers ne sont absolument pas le sujet principal du roman.
On y retrouve tout ce qui fait le style de Ken Follett : des alliances et des rivalités, des méchants très très méchants et des gentils vraiment gentils, et une belle histoire d'amour, tout cela sur fond historique (pour plus de détails, consulter les 848 pages du roman). Les faits historiques sont peut-être moins présents dans ce tome-ci, mais on se laisse encore une fois porter par l'histoire, on s'indigne devant les injustices et on n'arrive plus à s'arrêter !
Petit bonus pour les fans des Piliers de la Terre, le roman le plus célèbre de Ken Follett : le crépuscule et l'aube en est le tome précédent. On découvre comment est née la ville fictive de Kingsbridge.

Anaïs Nin, sur la mer des mensonges (choix de Mathieu)

Début des années 30, Anaïs Nin femme d’un banquier américain, vit avec lui dans les Yvelines et semble corsetée dans son existence un peu trop rangée d’épouse bourgeoise. Le journal qu’elle tient depuis des années et la rencontre du couple Miller, Henry et June, vont décupler ses envies de rencontres, d’amours, de sexes. Léonie Bischoff a choisi ce cadre pour parler de l’écrivaine Anaïs Nin, représentant sa vie et ses envies de l’époque à travers un récit tout en crayonné superbe. S’appuyant sur les relations épistolaires et le journal de l’autrice, elle plonge dans les histoires, la vie et les mensonges d’Anaïs Nin avec talent.

L'incroyable histoire de la médecine (choix de Mélanie)

Initialement paru en 2018, ce roman graphique ressort cette année dans une version augmentée. De la Préhistoire à nos jours, Jean-Noël Fabiani (professeur en Histoire de la médecine à Paris-Descartes) et Philippe Bercovici (le dessinateur des Femmes en blanc) nous racontent l'évolution de la médecine à travers les âges, et l'histoire de personnages savants, touche-à-tout, charlatans ou chanceux.
Une lecture bien ancrée dans l'année 2020, donc, pour comprendre tout le chemin parcouru avant d'arriver à notre médecine moderne (vous ne serez pas médecin pour autant à la fin) !

Odyssée (choix de Mathieu)

Histoire sans paroles d’un bateau de papier partant à l’aventure autour du monde, l’album déroule des dessins en noir et blanc pleine-page magnifiques. Récit fantastique, le voyage solitaire de l’esquif (frêle évidemment) nous fait traverser des océans charriant leurs lots de rencontres sorties de l’imaginaire foisonnant de son auteur. A la fois conseillé en cette fin d’année confinée et rappelant les peurs ancestrales des profondeurs.

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