Thomas est enseignant depuis plusieurs années en Haute-Garonne. Il exerce dans une classe de CE2-CM1-CM2. C’est un technophile, amateur de jeux vidéo qui aime entraîner ses élèves dans le fantastique pour leur donner goût au travail.

Cette manière de fonctionner se retrouve dans ce qu’il a vécu lorsqu’il était élève avec un de ses enseignants qui faisait de grandes histoires pour faire apprendre. Il a voulu partager ce plaisir avec ses élèves.

MISSION ODYSSEE

1. Lancement de la mission

Lors de l’année 2019-2020 (année du 1er confinement), Thomas a semé une graine qui a modifié ses pratiques pédagogiques pour les années qui ont suivi. Durant ce confinement, Thomas échangeait une fois par jour avec ses élèves pour leur envoyer et réceptionner leur travail. A ce moment-là, les activités étaient principalement basées sur les domaines du français et des mathématiques.

Pendant les vacances de Pâques, il a eu envie de marquer le coup et de proposer à ses élèves une interaction originale et amusante. Il a réalisé une vidéo (grâce à son iPad) sur le principe que l’on peut retrouver dans Star Wars avec un personnage en hologramme. Il souhaitait simplement à ses élèves de bonnes vacances. Il a eu de nombreux retours positifs de la part des familles qui l’ont incité à poursuivre sur ce chemin. Thomas a alors proposé à ses élèves de « vivre » une aventure « épique » : sauver la Terre pour pouvoir revenir en classe ! C’était le premier épisode de la mission Odyssée (lien YouTube : https://youtu.be/fAI8FRwytEo).

(Image tirée du premier épisode de la mission Odyssée 2019-2020)

Il s’est donné un rythme de parution d’une vidéo hebdomadaire pendant le confinement pour tenir en haleine les enfants. Pour réaliser ses séquences animées et les rendre plus vivantes, il a utilisé le système d’incrustation sur fond vert, a adopté des séquences animées de vaisseaux et des images fixes de cockpit. Il a également fait appel à une « Intelligence Artificielle » qui lui sert aux échanges expliquant la situation aux spectateurs. En réalité, une simple voix de synthèse qui lit les textes préparés en amont. A partir de là, les élèves ont suivi un travail scénarisé les amenant vers le trou noir à la recherche de leur objectif final et s’inscrivant dans un « jeu de rôle » pédagogique.

Le travail quotidien donné à distance pendant le confinement a légèrement changé : il a été rédigé sous forme d’une suite de missions où les documents portaient tous le logo de la mission Odyssée. En plus du travail scolaire sur table, Thomas a pu rajouter un entraînement physique « adapté au voyage dans l’espace »pour assurer la mission en utilisant l’outil EPS-and-coo (https://epsandcoo.glideapp.io/). Tout au long de cette période de classe à distance, les élèves ont été accompagnés par l’IA de la mission : P3-N3-L00P alias Pénélope. Elle incarne une entité différente et complémentaire de celle du capitaine joué par Thomas. La mission a duré jusqu’au dernier jour de l’année scolaire en voyant son rythme de parution changer au retour en classe et passer à une vidéo tous les 15 jours.

Travail nécessaire au fonctionnement de cette Odyssée.

Techniquement, il y a eu une partie difficile avec les prises de vue et la mise en scène. Les captures d’images étaient faites par Thomas, seul, avec une tablette, sans pouvoir contrôler immédiatement le cadrage sur fond vert. Par rapport au travail scolaire, il y a eu peu d’investissement supplémentaire : une sélection d’exercices, des leçons en lien avec l’aventure et l’apposition du logo sur les fiches de travail pour poursuivre l’immersion des élèves.

Thomas n’a pas préparé de trame narrative en amont. Il a préféré improviser, ce qui lui a laissé plus de libertés pour faire du lien entre l’aventure, l’actualité et le travail scolaire.

En ce qui concerne les sources, Thomas a récupéré les bases des documents grâce à des recherches sur la toile. Il a peu créé mais s’est focalisé sur la mise en page pour que celle-ci soit cohérente avec la mission. Il s’est également inspiré de jeux vidéo (dont Mass Effect) avec des mini-jeux qui permettent de casser le rythme et de ne pas faire sentir de lassitude chez les élèves.

Finalement, pour Thomas, toutes les activités menées restent ordinaires et peu exigeantes en termes de temps de travail ; elles trouvent un intérêt particulier par leurs liens et leur intégration dans un scénario inclus dans une plus grande histoire.

Ce projet n’a pas été mené seul jusqu’au bout par Thomas. Il a eu l’accompagnement progressif de collègues grâce à des échanges sur Twitter. Ils ont fini à 5 dans la mission (Thomas Héniart, Julien Crémoux, @NumerikInstit, @LonnyJ et @EdouardVincent).

Fin du projet et attitudes observées.

Chaque jour, les élèves quémandaient la suite de l’aventure et participaient facilement, volontairement. Ils ont été présents jusqu’au dernier jour. Pour cette ultime journée, Thomas s’est amusé à faire monter la pression chez les élèves en ne diffusant qu’une image  : celle du trou noir. Il prétextait ne pas avoir terminé le montage de l’épisode final... Ainsi, il a pu facilement finaliser son année avec ses élèves et se débarrasser des tâches moins agréables (rangement notamment). La classe a dû patienter jusqu’en milieu d’après-midi pour enfin découvrir le final de leur histoire. Elle a participé à une courte visio avec une classe ayant également réalisé cette Odyssée (la classe de Julien Crémoux / https://twitter.com/julien_cremoux). Enfin, les enfants ont reçu un diplôme et un badge (qui est encore porté en 2021/2022 par les élèves présents en 2019/2020) aux couleurs de la mission.

Thomas propose de retrouver une grande partie de ce qu’il a réalisé sur son blog (https://labocalvin.wordpress.com/home/) et sur la chaîne YouTube de sa classe (https://www.youtube.com/playlist?list=PLnYrJeTrPJ5aklDUNCoeGuKGMLidy23DV)

Mission Mythologies.

En 2020-2021, Thomas a fait travailler ses élèves sur l’évolution de l’écriture (formes, utilisations, etc.). Pour y arriver, il a fait voyager sa classe à la recherche du secret des dieux anciens : de l’Égypte ancienne, par la Grèce antique en allant rencontrer les peuples Vikings jusqu’au pays d’Avalon et du roi Arthur.

De nombreuses activités scolaires (géographie, histoire, lecture, écriture, etc.) étaient liées à l’étude des mythes ou à des faits se rapportant à ces mythes, à ces périodes historiques (vous pourrez retrouver plus en détails les activités menées sur son blog).

Pour immerger les élèves, Thomas a maintenu une mini-mission de clôture à la fin de chaque période de travail. Il est également parti dans l’idée de suivre Cléopâtre ou les traces de Cléopâtre a travers le temps et l’espace en se permettant des écarts avec la réalité historique.

Il a notamment envoyé ses élèves chercher le chemin de Cléopâtre grâce aux jeux vidéo Assassin’s Creed (Assassin’s creed Origins et Assassin’s creed Odyssey) qui proposent un mode découverte (Discovery tour) où l’on peut à sa guise se déplacer dans ces univers passés reconstitués. L’activité a pris la forme d’un jeu de piste, en classe, face au vidéoprojecteur, où les enfants se déplaçaient dans le jeu grâce à des énigmes mises en place par leur enseignant. Cette activité a fortement impliqué les élèves dans le projet pour un temps de préparation assez faible : une soirée à « jouer » devant sa télé avec un papier et un crayon pour définir des énigmes. A la fin de cette étape, la classe s’est retrouvée dans le labyrinthe du Minotaure.

Le projet s’est continué avec les Vikings. A Stonehenge, les élèves ont pu retrouver Cléopâtre et son recueil (poursuite du thème de l’écriture). A la fin du projet, le secret de Cléopâtre est apporté à Avalon et a pu dévoiler aux enfants que l’écriture est ce qui permet de fixer l’histoire, d’écrire une légende pour ne jamais oublier.

Pour conclure ce parcours, les élèves de la classe ayant pu décrire une de leurs réussites de l’année à la manière d’un chevalier ont fini adoubés par le roi Arthur (imaginez Thomas grimé en roi Arthur) avec remise d’un certificat d’adoubement.

Mission sciences.

Pour l’année courante (2021-2022), Thomas a préféré se tourner vers les sciences afin de mettre en place plusieurs projets : blob, espace (qui a reparlé d’une mission Odyssée ?), géologie… Il s’est très pragmatiquement appuyé sur l’actualité autour de Mars pour choisir ses thèmes de travail.

Les élèves de Thomas vont pouvoir cette année :
- Élever un blob en lien avec les expériences de Thomas Pesquet à bord de l’ISS.
- Explorer Mars avec la sonde Persévérance.
- Créer la première colonie humaine sur Mars.
- Étudier la géologie et notamment la formation des cratères visibles à la surface de la planète rouge.
- Créer un collège sur Mars, présenter le projet à un congrès scientifique des enfants ayant lieu à la cité de l’espace (Toulouse).
- D’autres projets sont encore évoqués mais il est encore tôt dans l’année scolaire et d’autres surprises pourraient arriver.

Le premier projet d’étude de l’année, consacré au blob, a duré 7 semaines (première période de l’année). Pour Thomas, ce fut un temps suffisant à ne pas dépasser pour que les élèves conservent l’enthousiasme lié à la découverte et aux expériences, sans que la lassitude ne vienne trop se faire sentir. Les élèves ont pu consulter plusieurs articles de Thomas Pesquet qui a étudié cet être vivant particulier. Ils ont également pu échanger sur Twitter avec Audrey Dussutour (chercheuse au CNRS : @Docteur_Drey).

Durant cette étude, les élèves ont pu réinvestir de nombreuses compétences scolaires : observation, description, analyse et raisonnement, rédaction, géométrie (tracé et découpe des filtres papier), mesures de longueurs.

Les élèves pourront travailler sur les modalités utilisées pour cartographier Mars. Ils les compareront avec celles utilisées sur Terre et pourront dégager les principales différences notamment en ce qui concerne les altitudes. Ce sera aussi l’occasion de modéliser un volcan (avec un marquage des zones [impacts, projections, etc...]) et d’étudier le phénomène de stratification grâce à de la pâte à modeler. Les élèves pourront également faire des carottages, creuser et observer des vallées et des failles. Toute cette dernière partie sera réalisée sur le site internet de la NASA. En littérature, Thomas a prévu de faire travailler ses élèves sur le livre "Georges et les secrets de l'univers", écrit par Stephen Hawkins.

Pour continuer à les faire rêver, Thomas a mis ses élèves au défi de mettre en sécurité la sonde Persévérance. Avec une photo de la surface martienne et quelques traits, les enfants doivent réaliser un programme informatique qui amène la sonde de son point de départ vers une zone de sûreté. Pour cela, il utilise Scratch et des documents « faits maison » aux couleurs de la mission. La mission est également annoncée non pas par l’enseignant mais par le personnage numérique créé il y a deux ans, P3-N3-L00P (Pénélope).

Thomas rappelle dans nos échanges qu’il ne fait pas de missions tous les jours ! Il se contente généralement d’habiller son travail aux couleurs des missions (un logo, une image, un personnage…) pour conserver le fil aux apprentissages.

Projets pour continuer l’année 2021-2022.

Thomas a inscrit sa classe dans un projet qui propose de créer un collège sur Mars. Cette activité se fait en couplant sa classe avec une autre classe de collège. Si sa classe est acceptée, elle sera accompagnée par des doctorants et par des professionnels afin que le projet puisse être cohérent dans la création de la maquette et dans la rédaction de la charte de vie de ce collège de la planète rouge.

Il a également envie d’amener ses élèves à envoyer et à recevoir des fusées mais aussi, de profiter du retour de Thomas Pesquet sur Terre pour travailler avec ses élèves sur comment atterrir « sans risque ».

Recul général de Thomas sur son fonctionnement.

Thomas avoue qu’il se lance généralement dans les apprentissages dès qu’il sent qu’il peut y avoir des apprentissages pédagogiques pertinents à la clé, que cela fasse partie des programmes ou non  : il souhaite partager ses passions (films, jeux, livres) afin d’accrocher les enfants.

A ce jour, les élèves continuent de poser des questions sur les missions (précédentes et actuelle) sur différents sujets : Comment faire pousser des plantes (sur Mars) ? Comment avoir de l’oxygène (sur Mars) ? Cela permet de faire émerger des connaissances et même de parler d’ingénierie.

Les questions des élèves apportent à Thomas la matière aux apprentissages qui s’enchaînent alors les uns après les autres.

Thomas insiste sur un point important. Il crée peu lui-même des ressources de A à Z. Il récupère souvent des ressources (en langue française ou anglaise) en les centralisant et en les organisant dans un fil conducteur narratif.

Dans ses ressources favorites, il parle de :
- National GeoKid (https://kids.nationalgeographic.com/)
- Le Jet Propulsion Laboratory de la NASA (https://www.jpl.nasa.gov/)
- la partie destinée aux enseignants de l’ESA (https://www.esa.int/Education/Teachers_Corner/European_Space_Education_Resource_Office) avec une multitude de projets (Mission X, Moon Camp, Astro Pi, etc.)

Thomas constate que le travail se passe bien avec les élèves, qu’ils sont contents, tout comme les parents. Le suivi de ces parents se fait par l’intermédiaire d’EduCartable qui lui permet d'échanger facilement et rapidement.